
La manière dont les autorités rwandaises traitent le cas de Mme Victoire Ingabire Umuhoza est un nouvel exemple de leur mépris pour le droit national et international. Cette situation devrait susciter des inquiétudes, en particulier chez les États et les entités commerciales du monde entier ayant conclu ou envisageant de conclure des partenariats avec le gouvernement rwandais.
La justice rwandaise a en effet fourni de nombreuses preuves confirmant que Mme Ingabire, dirigeante de l’opposition arrêtée et détenue par les autorités rwandaises en juin 2025, ne bénéficiera jamais d’un procès équitable.
- Les juges chargés du procès de huit personnes associées au parti DALFA-UMURINZI de Mme Ingabire et d’un journaliste indépendant ont ordonné au procureur d’enquêter sur elle. Ces neuf accusés sont poursuivis pour avoir discuté d’un livre sur la résistance non violente et pour avoir suivi une formation en ligne sur ces techniques. Leur cas a été examiné par le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, qui a conclu que leur détention constituait une violation du droit international relatif aux droits humains.
- Les instructions des juges ne laissent aucun doute sur le fait qu’ils attendent du procureur qu’il inculpe et mette en accusation Mme Ingabire.
- Le Bureau d’enquête du Rwanda (RIB) a arrêté Mme Ingabire le 19 juin 2025, soit le jour même où les juges ont chargé le procureur d’enquêter sur elle. Depuis lors, elle n’a pas été autorisée à parler à sa famille ni à son équipe juridique internationale. Il s’agit là d’une violation des Règles Mandela, qui fixent les normes minimales de traitement des prisonniers.
- Mme Ingabire s’est vu refuser le droit de choisir son avocat, le Barreau rwandais (RBA) ayant rejeté la demande d’un avocat kenyan souhaitant la défendre, au motif de la réciprocité. Or, les règles et règlements du RBA stipulent que les avocats de la Communauté d’Afrique de l’Est sont exemptés de cette exigence. Cette décision viole également le protocole du marché commun de l’Afrique de l’Est.
- Malgré le recours constitutionnel en cours devant la Cour suprême concernant les poursuites et la détention de Mme Ingabire, le tribunal de première instance n’a pas ajourné la procédure à son encontre, comme le prévoit la loi rwandaise sur la compétence des tribunaux.
- Le même tribunal a statué en faveur du maintien en détention de Mme Ingabire, alors que le ministère public n’avait pas présenté d’acte d’accusation dans les délais impartis.
- Elle est actuellement détenue à l’écart de la population carcérale générale. Elle partage une cellule avec une autre femme condamnée pour meurtre. Il est à la fois irrégulier et dangereux de placer une personne non condamnée en détention provisoire avec un prisonnier condamné pour un crime grave et violent, d’autant que Mme Ingabire est une personnalité politique ayant déjà reçu des menaces de mort.
- Contrairement aux autres détenus, elle n’est pas autorisée à avoir une radio ou une télévision, ni à assister aux offices religieux du dimanche. Malgré les ordonnances délivrées par un médecin, la direction de la prison a refusé de lui fournir les médicaments dont elle a besoin.
- La récente décision de la justice rwandaise de désigner les juges qui ont ordonné au ministère public d’enquêter (et de poursuivre) Mme Ingabire pour juger son affaire constitue la preuve définitive qu’elle ne bénéficiera jamais d’un procès équitable.
Dans ce contexte, la Fondation Victoire pour la Paix invite les États et les entités commerciales du monde entier ayant conclu ou envisageant de conclure des partenariats avec le gouvernement rwandais à dénoncer ce dernier et à tenir ses dirigeants responsables du non-respect des valeurs universelles, des droits de l’homme et des lois et conventions internationales. Il est important de le faire, car les relations fondées uniquement sur des transactions, sans tenir compte des valeurs universelles fondamentales, limitent la coopération diplomatique, sapent la responsabilité sociale des entreprises et nuisent à leur réputation à court et à long terme.
Fait à Bruxelles le 10 octobre 2025.
